L’Euro 2012, un œil dans le rétro (LeMonde.fr)

Le 11 juin 2012 - Par qui vous parle de , , Tags : , , , , , , , , , , , ,

Premier épisode des Chroniques tactiques que Football totalitaire animera, durant l’Euro 2012, dans les pages sport de LeMonde.fr. Article original initialement publié la veille du match d’ouverture, et que vous pouvez consulter ici. La version ci-dessous, si elle n’a pas été modifiée, est agrémentée de quelques liens qui n’avaient pas leur place sur LeMonde…

Tous les deux ans, Euros et Coupes du monde se relaient pour donner à voir les grandes tendances en cours du football moderne, en termes de styles de jeu comme de schémas tactiques. Qu’est-on en droit d’attendre de cet Euro 2012, qui sera le reflet des récentes évolutions du haut niveau européen ?

Que les plus enthousiastes rafraîchissent leurs ardeurs : l’Euro 2012 ne devrait pas réserver de grandes surprises tactiques. Est-ce parce que le football européen n’a jamais été aussi homogène ? Avec l’élargissement des frontières en Ligue des champions et Ligue Europa, supporteurs et entraîneurs finissent par (presque) tout connaître du football continental, jusqu’aux systèmes de jeu les plus exotiques.

LE 4-2-3-1, SYSTÈME ÉTALON

Les équipes s’observent, se jaugent et logiquement se copient. Ce qui explique pourquoi les principales innovations de la dernière Coupe du monde avaient toutes été portées par des équipes non européennes. A l’Euro, les dispositifs s’aligneront inévitablement sur quelques schémas éprouvés.

Avec le 4-4-2 sur le déclin et l’exigence du 4-3-3, le football moderne a semble-t-il trouvé son système idéal avec le 4-2-3-1. Schéma premier de la classe, il rend l’équipe à la fois solide à l’arrière, complète au milieu, et valorisant les individualités techniques à l’avant. Il devrait dominer la compétition, tant chez les favoris que chez les outsiders (la possible surprise suédoise, et la France et ses qualités offensives), sans oublier les petits teigneux qui espèrent bien faire un coup (République tchèque, Danemark et Pologne). Preuve de son actualité, le schéma a été utilisé par le trio de tête de la dernière Coupe du monde, autrement dit, les grands favoris de cet Euro : Allemagne, Espagne et Pays-Bas (bien que ce dernier se rapproche davantage d’un 4-3-3 selon le rôle des ailiers et la position de Sneijder)

LE RETOUR DE LA DÉFENSE A TROIS ?

On la pensait morte et enterrée. Ou du moins remisée au grenier pour les grandes compétitions. La défense à trois a fait son retour sur la scène européenne. Et c’est au pays du bunga-bunga que le système vieillissant a retrouvé sa vigueur d’antan, d’abord à Naples ou à l’Udinese, pour finalement séduire la Vielle Dame turinoise avec succès : un Scudetto remporté et surtout aucune défaite avec seulement 20 buts encaissés, record des cinq championnats majeurs. Le retour des défenses à trois s’est d’ailleurs exporté dans des clubs de renom, avec plus ou moins de succès : le Barça a trouvé ses limites dans un 3-4-3 des plus « cruijffiens« , et Bordeaux doit sa résurrection en championnat à l’importation d’un 3-5-2 transalpin au sortir de la trêve hivernale.

Pour autant, aura-t-on la chance de voir une équipe jouer à trois défenseurs ? Rien n’est moins sûr. Compte tenu des exigences d’un tel système, seules quelques équipes pourraient se le permettre, en particulier l’Italie, qui possède sept joueurs de la Juventus dans son effectif, dont les trois défenseurs habituellement titulaires. Malheureusement, le probable forfait de Barzagli complique largement la tâche du sélectionneur, et pourrait sonner le glas d’une telle stratégie… bien que l’entraîneur semble vouloir poursuivre dans cette voie. En Espagne, en revanche, le forfait de Puyol, taulier de la défense, aura définitivement achevé toute velléité d’imiter le trident catalan.

LE FOOTBALL SANS ATTAQUANT PEUT-IL CASSER DES BRIQUES ?

Le terrain semble plus propice à l’innovation de l’autre côté de l’équipe. Le football dit « sans attaquant » aura indéniablement marqué ces dernières saisons, notamment portées par les succès de Guardiola à la tête du Barça. En cause, une évolution des rôles et profils de joueurs qui déporte les responsabilités offensives non plus sur des buteurs purs, mais aussi et surtout sur les ailiers ou les milieux offensifs (Jérémy Ménez en pointe avec le PSG en est l’un des meilleurs exemples).

Sans aller jusqu’à cet extrême, réservé aux équipes possédant des individualités offensives bien spécifiques, le football moderne est marqué par le retrait progressif des buteurs purs. La mort du « renard« , ce no 9 un peu pataud qui faisait rêver nos pères, est l’un des symptômes de cette évolution. Cela se traduira, à l’Euro, par l’hégémonie annoncée du 4-2-3-1, qui fait la part belle aux milieux offensifs et réduit inévitablement le nombre d’attaquants purs dans la compétition.

Seul un nombre restreint d’équipes devrait même rester fidèle à la traditionnelle paire d’attaquants complémentaires, qui façonne le football en 4-4-2 depuis tant d’années. Parmi les grands, seule l’Italie devrait y postuler, et peut-être l’Angleterre, qui débutera en 4-4-1-1 en attendant le retour de Rooney, suspendu pour les premiers matches. Autrement dit, deux équipes majeures que peu d’observateurs voient vraiment fulgurer dans la compétition. Un signe ? Le choix est en tous cas iconoclaste : si le système représente le b.a.-ba du football (voire le degré zéro de l’innovation tactique, diraient certains), il pourrait paradoxalement ouvrir quelques belles portes dans cet Euro. Ironie de l’évolution, le déclin du 4-4-2 au plus haut niveau signifie aussi que nombre d’adversaires, parmi les favoris, devront « réapprendre » à défendre face à deux attaquants aussi talentueux que Cassano ou Balotelli.

Toute audace tactique risque quoi qu’il arrive de s’avérer payante. Comme souvent dans les compétitions internationales, le manque de temps de préparation implique inévitablement de s’appuyer sur les schémas tactiques les mieux assimilés par les joueurs, mais donc aussi les plus prévisibles. Aux tacticiens de trouver ce savant équilibre entre pragmatisme et expérimentation.

3 commentaires

  • Le 4-2-3-1 prédomine et on assiste souvent au même match, surtout les 20 premières minutes… L’audace vient avec les changements même si elle reste timide.
    Bien vu pour l’Italie pour son système, devin ? :) Système très intéressant avec un bon De Rossi mais qui finalement craque par deux fois en deuxième mi temps, contre l’Espagne l’entrée de Torres ayant fait aussi très mal à l’Italie. Del Bosque a voulu faire du Guardiola malgré le but de Fabregas, l’arbre cachant la forêt pour ce match, à mon sens, Torres aurait fait plus de dégâts même si il était en manque de confiance
    Peut-on dire que la France joue sans attaquant ? Benzema dézone énormément et est rarement à la conclusion de l’action, le match de ce soir va t-il me faire mentir ?
    Finalement, seul l’Allemagne joue avec un pur n°9 du moins dans les grosses écuries.

    • Toutes les réponses à tes remarques (toutes pertinentes) dans les prochains rapports sur LeMonde.fr… Samedi : bilan des deux premiers matchs Bleus, on discutera évidemment du cas Benzema… Et mercredi, bilan du premier tour, avec d’ailleurs un paragraphe sur le rôle de De Rossi <3

      C'est toi le devin !

  • Avec cette première mi temps, on voit bien que Menez est plus adapté avec un schéma avec un neuf et demi alors que Nasri repiquait toujours à l’intérieur, en 10 ! J’ai déjà mon début de réponse, je pense ! :)
    J’attends demain avec impatience alors !
    De Rossi a été monstrueux, superbe joueur !

Répondre à Philippe Gargov

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